la farandole
des mauvais garçons
Julien est une connaissance de longue date. Il fait des photographies qui ne passent pas inaperçues, c’est pour ça que nous avons souhaité en présenter quelques-unes dans le maelström papier #05. En voici un peu plus sur ce photographe parisien, qui est à l’opposé de ce qu’il montre via ses clichés.
* La photo, ça a commencé comment ?
C’est venu assez tardivement. J’ai commencé par une école, je prenais des cours du soir, pour le fun. Avant je faisais du skateboard, puis il a fallu faire un truc sérieux de sa vie, la photo ça n’était peut-être pas la meilleure des idées pour avoir quelque chose de stable, mais ça me semblait intéressant, c’était aussi lié au skate, aux potes. J’ai fait deux ans d’école, un CAP, mais je ne suis pas allé jusqu’au bout. Les profs et les gens de l’école étaient vraiment cool, ça m’a donné envie de continuer.
Après l’école, il s’est passé une petite année pendant laquelle j’ai bossé dans une boutique Levi’s, qui s’appelait Nim, un concept store et une galerie. Via ce travail, j’ai rencontré un photographe, Jan Welters, qui m’a proposé de venir sur les shootings pour voir comment ça se passait, de fil en aiguille je suis devenu son assistant, et je suis resté 5 ans avec lui.
* Tu peux parler du travail d’assistant ?
Au début ça consiste à assister le photographe sur tout ce qui peut lui rendre la vie plus facile, c’est-à-dire : préparer les lumières, charger et décharger les appareils, amener les films au labo, faire les choix avec lui. Il y a eu une confiance importante qui s’est établie entre nous, on est devenu proche, donc j’ai pu avoir plus de responsabilités.
* Quels étaient les meilleurs moments de ce boulot ?
Les road-trips ! les ambiances camions, c’était cool. Jan est quelqu’un de super sympa, avec un côté rock & roll, une vraie gentillesse et un regard de photographe, j’ai eu de la chance à ce niveau là.
* Ça fait quoi de se lancer en solo ?
Ça a été super dur, parce que lorsqu’on reste aussi longtemps avec quelqu’un, souvent on essaie de lui ressembler, on travaille comme lui. La transition est assez longue pour trouver son identité, pour éviter de ressembler à celui que l’on a assisté. J’ai un univers qui m’est propre, par rapport aux gens que je côtoie, j’ai commencé à les prendre en photo, puis ça a pris le dessus.
* Tu as un style particulier, et tu sais précisément ce que tu veux prendre en photo, comment tu en es arrivé là ?
Le photographe que j’assistais était un vrai photographe de mode, mais ce n’est pas un esthétique qui me correspondait, et le fait que ce soit éphémère, les saisons qui durent 6 mois, ça change beaucoup, ça ne me branchait pas trop. J’avais envie de recherche, de vérités, avec des gens sans concession, que l’on accepte ou que l’on n’accepte pas, et qui nous acceptent de leur côté. Ça m’a amené de plus en plus loin, et ça devient vraiment intéressant de pouvoir continuer dans cette voie. C’est un long travail, la confiance met du temps à s’installer, et je commence à être accepté, par rapport à mon travail et l’honnêteté de mes images. Par contre, il faut savoir rester à sa place, être ce que l’on est.
* Tes clichés sont à l’image de ton mode de vie ?
Pas vraiment, je suis quelqu’un d’assez calme, j’ai une vie calme. Je ne suis pas un bad boy. Je fais mes photos, un peu de skate, du vélo, je n’essaie pas de devenir quelqu’un d’autre. J’ai une certaine admiration pour ces gens, pour leur vie sans concession, j’admire car je n’aurais pas vraiment le courage de vivre ainsi ; c’est aussi une façon de le vivre par rapport à mes images.
* Tu n’as jamais souhaité écrire des histoires autour de tes photos ?
Ça, je ne fais pas car le côté journalistique passe mal auprès des gens que je prends en photo, et ça ne m’aurait pas spécialement intéressé. Je crois que les images disent beaucoup de choses, et je souhaite que les gens se fassent leurs propres idées en les regardant. Écrire c’est porter un jugement et je n’ai pas envie de faire ça, ce n’est pas mon rôle, et je ne m’en sens pas capable.
* Les journalistes sont mal vus ?
Ils sont assez mal vu oui, car ils ont eu tendance à raconter pas mal de conneries, même si certains sont professionnels, avec une démarche honnête. En général, c’est vite fait bien fait, en rendant le truc le plus hard possible, et c’est souvent des conneries.
* On a tendance à te classer comme celui qui photographie des gens tatoués, alors que ta démarche est plus complexe que ça…
J’aime bien le tatouage, mais avant tout c’est l’univers rock qui me plaît, et souvent dans le rock les gens sont tatoués. J’aime quand les gens ont des tatouages qui vont avec leur personnalité, avant tout c’est la personne qui m’intéresse. Esthétiquement, des tatouages, c’est impressionnant sur des images, ça signifie beaucoup, c’est comme un puzzle ; il y a des images pour lesquelles il faut être initié pour les décrypter, et si on s’y intéresse on s’aperçoit qu’il y a plein de choses à comprendre, et c’est passionnant.
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* Tu as aussi le souci du détail…
Les détails, c’est ce qu’il me reste de mon expérience dans la mode. En général, dans les photos de ce genre d’univers, plutôt sombre et dur, il y a rarement de détails, c’est souvent des images très brutes. J’ai toujours aimé les détails, ce sont des choses auxquelles je fais attention, ça donne un plus à la photo.
* Tu bosses à la commande ?
L’année dernière, j’ai fait une campagne de pub pour la marque Edwin, c’était vraiment intéressant car j’ai eu carte blanche. J’ai pu bosser avec des mecs comme Tintin qui ont un univers très fort. Ce qui m’intéresse, c’est de rester authentique.
* Il y a des photographes qui t’intéressent ?
Je m’intéresse à plein de choses, mais pas à un photographe en particuliers. Je regarde beaucoup de films, j’aime le skate et l’esprit rock stars de groupes comme Mötley Crüe, Guns & Roses, mon univers vient de là… En photo, il n’y a pas de gens qui m’ont influencé. J’aime bien les livres de photos snapshot, ambiance sur la route, mais les livres de photos de photographes, ça m’ennuie un peu.
* Pourquoi tu ne shootes qu’en argentique ?
Pour des questions de moyens, on dit que l’argentique revient plus cher que le numérique, ce qui est plus ou moins vrai quand on utilise un format 24×36, mais j’aime le moyen format. Et par rapport à ma façon de travailler, je suis un peu à l’arrache, je ne pourrais pas utiliser un moyen format numérique, trop cher et trop contraignant à utiliser, et je n’aurais pas les profondeurs de champ que je souhaite. Le numérique, je trouve ça fade, ça manque de relief. Je crois que c’est bien pour quelqu’un qui fait beaucoup de pubs ou de mode, et pour le grand public. C’est aussi fragile, et faire réparer un Hasselblad numérique, c’est vraiment cher. On trouve du matériel moyen format d’occasion pas trop cher, tant pis pour ceux qui le délaissent, merci pour nous !
* Qui serait la personne ultime à photographier ?
J’ai une liste ! Je travaille dessus d’ailleurs ! Je pourrais citer Mickey Rourke, Calvin Russel et Axl Rose. J’aimerais bien leur tirer le portrait, et voir de grands tirages exposés de ces mecs-là !
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