Necro, la conversation [archive]

Brooklyn go hard and gore

[2002] Necro vit dans la crainte d’un nouveau 11 septembre, son album « Gory days » a un an. Son succès d’estime ne cesse de croître et les commandes s’entassent dans son petit appartement miteux du fin fond de Brooklyn. Rendez-vous fixé pour une interview et quelques photographies, le sieur est sympathique et accueillant, posé et bosseur, par contre il est inquiet, The Sopranos va bientôt commencer et il n’a pas envie de rater le début…

Necro : C’EST MOI OU IL FAIT CHAUD ICI ??!!

*Il fait chaud je crois…

N : Ok, je vais mettre l’air conditionné… Cet endroit est un putain de bordel, je passe mon temps à bosser, je n’ai pas le temps de nettoyer. Je dors à côté et je fais les colis ici, là il n’y en a pas trop, mais d’habitude c’est plein. Il y a un gars qui bosse avec moi, mais il bosse tellement qu’il n’a pas la force de nettoyer après. Il se tue pour que les paquets partent en temps et en heure. It’s life on the fast-lane ! Il faut travailler si tu veux que les choses se passent, et je veux que ça se passe donc je suis sérieux avec le travail…

*C’est cool de me recevoir…

N : Ouais mais faut faire vite avant que Sopranos ne commence…

*Bon, pour commencer présente-toi…

N : Je suis Necro…

*Quand as-tu entendu parler de hip-hop pour la première fois…

N : C’était il y a bien longtemps, quand j’habitais dans un project, à Brooklyn, tout le monde mettait du hip-hop à fond, de Beastie Boys à Run-Dmc. J’avais entre 5 et 7 ans et les grands scotchaient en bas de l’immeuble avec des Kangols et de gros ghetto-blasters. J’ai grandi dans cet univers, ça devait être entre 83 et 85, on entendait souvent The Message de GrandMaster Flash…

*Et tu as décidé toi aussi de faire du rap ?

Au début, on faisait du Heavy-Metal avec mon frère, et puis je suis tombé dedans, avec Roxanne Shante, Slick Rick… Ill Bill [le frère de Necro donc, vu dans Non-Phixion et plus récemment en solo et avec DJ Muggs] a commencé à écrire des rimes, ce devait être entre 89 et 90, et c’est en 91 que l’on a commencé à faire ça sérieusement, à produire des démos…

*Tu jouais du Heavy-Metal ?!

Ouais, je jouais de la guitare et mon frère était bassiste. On a ouvert pour pas mal de groupes : Obituary, Napalm Death, Bio Hazard, tu connais ces gens ? On a joué dans le plus gros club de Brooklyn où tout les plus grands sont passés, de Metallica à Slayer… On a fait plein de shows là-bas. Sinon, je joue encore de la guitare, de la batterie et de l’orgue… Et je sais lire une partition, c’est pour ça que mes beats sont bons !

*Tu es indépendant, c’est…

Difficile ! Tout est difficile dans la vie ! Jaÿ-Z est aujourd’hui indépendant avec Roc-A-Fella, et même s’il est signé chez Def Jam, il doit être en studio chaque jour pour progresser. Il y a plusieurs choses, si tu n’as pas le don tu seras toujours “wack, et même si tu as le don, tu dois passer du temps en studio, heures après heures. La technique n’est pas tout, tu dois aussi t’occuper du business qui va avec, avoir de bons beats, bien mixer ton son, avoir un bon master, tu dois parler à tes fans correctement. Tu ne dois pas être seulement un bon rapper, c’est un paquet clef en main que tu dois fournir.

*Comment tu vis le fait d’être blanc dans le Hip-Hop ?

Le hip-hop est raciste et tu ne vois aucun blanc émergé actuellement à part Eminem. Pourtant dans l’underground il y a un tas de kids qui déchirent. Je ne suis pas fan de ce mot underground qui ne veut pas dire grand chose, car tu presses un disque et ça y est tu es underground. Dans le hip-hop tu dois mériter ce à quoi tu prétends, pour moi les blancs doivent travailler cinquante fois plus pour y arriver. 90% du rap pue et si tu es blanc et mauvais, c’est le pire truc au monde. Dans l’underground, il n’y a pas de barrières que tu sois français, asiatique, italien ou juif ; c’est une mentalité et non une couleur de peau ; c’est tout pour la musique. Par contre lorsque tu passes en major, il y a des critères de jugement qui interviennent par rapport au fait que tu sois blanc ou noir. Il faut des rappers espagnols pour le marché espagnol, un DMX pour le marché noir et un Eminem pour le marché blanc. Moi, je pense que je peux toucher tous les gens qui sont dingues dans ce monde, ceux qui aiment les “brutal shit”, et ça fait au moins un million de personnes. Je veux être FUCKED-UP NECRO, je veux laver le cerveau d’un maximum de gens. Quand RUN-DMC et Russel Simmons sont arrivés, ça a marché parce qu’ils ont fait quelques chose de différent. Jaÿ-Z, tout le monde le critiquait, personne ne voulait le signer et il a fait trois albums avant d’être chez Def Jam. Il est arrivé avec un style genre “digidigigdi” [il chantonne], qui était tout pourri, donc il est revenu avec un nouveau style… Les plus grands ont souvent fait plusieurs entrées, moi je suis DOPE depuis le début. J’ai mon propre style et je n’aurai pas besoin de revenir plusieurs fois. RZA est arrivé avec « We Love You Rakeem », puis il est revenu plus tard avec le Wu, Genius est arrivé avec un premier album discret, il est ensuite revenu avec le Wu-Tang et il a sorti un classique. Peu de gens sont arrivés en cassant la baraque dès le début : Nas est arrivé avec « Illmatic » et c’était incroyable, mais ça reste une exception. Ça prouve que si c’est bien, les gens aimeront.

*Tu es prêt à tout pour réussir ?

Je ne souhaite pas sortir des trucs commerciaux, ça n’est pas mon tempérament. Je suis mon propre patron et je sors des disques qui me plaisent, qui me rendent heureux. Je veux faire « Dead Body Disposal » et non « Biggie can’t you see », je trouve ça WACK… Je veux faire des beats que personne n’a entendu avant. Je le fais pour la cause, j’aime ce que je fais, mais je veux pouvoir en vivre correctement, faire des thunes. Je ne veux pas rapper à l’œil ! Il va peut-être me falloir encore six ans pour exploser comme Cash Money ou No Limit, mais j’ai beaucoup de fans. Et les fans qui achètent mes disques aujourd’hui les achèteront encore dans dix ans. Eminem est le plus malin, car il sort des albums commerciaux, mais d’un autre côté il fait des freestyles qui défoncent. Beaucoup de ceux qui vendent de la merde aujourd’hui ne font rien de bien en parallèle, et c’est dommage..

*Qu’est-ce qui t’inspire ?

Pour le business ce sont les mecs comme Master P, Puffy, Damon Dash, Too Short, Jermaine Dupri, Michael Jordan, Jaÿ-Z ou E-40, tous ces CATS… Musicalement, je suis inspiré par tout ce qui est bon : un phat beat de Mobb Deep, Kool G Rap ou A Tribe Called Quest, Gangstarr… ça m’a inspiré pour mes productions. Aujourd’hui, je suis inspiré par ce que je fais, par mon travail. Eminem m’inspire, il ne m’influence pas, c’est juste que c’est un blanc qui vend plus de disques que n’importe qui, et je trouve ça dément. Il faut prendre conscience que la plupart des consommateurs sont blancs, 80% au moins, donc quand il y a un blanc qui apparaît, il faut que ça déchire. Peu importe la couleur, tu n’as pas besoin d’être un gangster, il faut juste être DOPE pour que tout le monde t’aime. Je suis DOPE et c’est pour ça qu’on m’aime !

*Tu aimes toujours le hip-hop ?

Si je l’aime !? Bien sûr! J’aime Cormega, 50 Cent, Killarmy, Mobb Deep, Non-Phixion et mes trucs aussi, c’est tout je crois. J’aime ce qui est HARDCORE . Si ça parle de meurtres et de sang, ça me plaît ; je n’aime pas les trucs avec des métaphores bizarres ou le hip-hop de nerds. J’aime ce qui vient de la rue, et si ce n’est pas estampillé STREET, je n’aime pas. C’est comme le rock, on peut dire que plus de 50% des trucs sont de la merde, c’est vrai, non !? Et pourtant c’est disponible partout. Je n’aime pas 90% du hip-hop d’aujourd’hui, et pourtant ils ont des fans et de l’argent.
De mon côté, je ne fais pas autant de business mais je travaille, alors tu crois que je vais aller perde mon temps à dire de la merde sur les autres ?!

*Tu peux nous parler du Dvd qui accompagne la nouvelle version de « Gory Days » ?

Il y a des concerts, mes films, des filles avec des flingues, des images de mon oncle Howie après le shooting du clip de « I Need Drug« , il y a un freestyle chez Stretch & Bobbito, des rappers qui disent ce qu’ils pensent de moi, il y a Master P qui dit combien ce que je fais est mortel, moi qui fais des blagues dans la rue… des tonnes de trucs ! Deux heures et demie d’images, plus l’album « Gory Days » avec deux nouveau titres et un artwork qui déchire. Tu comprends ce que c’est cette couverture ? C’est le monde qui devient fou ! C’est pour le titre » World Gone Mad« , c’est une représentation d’un soldat dans une camisole de force, mais en fait c’est le monde dans une chambre capitonnée !

*Pour finir, pourquoi tu ne fais pas partie de Non-Phixion ?

Parce que Mc Serch est un trouduc’ ! Il ne voulait pas de moi dans le groupe, il ne m’aimait pas, je suis trop HARDCORE pour lui…

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post-scriptum 02 : Necro en concert à Paris le 13 décembre 2010, avec Rémi Domost en première partie !!! (ICI)

post-sriptum 03 : Necro sur TWITTER, Necro sur FORMSPRING

post-scriptum 04 : un peu plus de ILL BILL ICI

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